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II. L'humain et le regard extérieur

  1. Cette affirmation selon laquelle « l’homme se constitue dans un milieu » et que grâce à un tel milieu (naturel pour les uns, social pour les autres et les deux pour d’autres encore) l’être humain se “constitue” (?) ne nous dit rien de substantiel. Une telle inconsistance s’aggrave si l’on souligne la relation qu’induit le terme “constitue”, qui suppose admise la compréhension des termes “homme” et “milieu”, où le “milieu” est ce qui entoure ou submerge l’être humain, et “homme” est ce qui est à l’intérieur ou bien submergé par le “milieu”. Nous continuons donc, comme au début, à tourner dans la vacuité. Nous remarquons cependant que la mise en relation des deux expressions fait référence à des entités séparées et qu’il y a une intention d’unir cette séparation par une relation truquée, provoquée par le mot “constitue”, qui a des implications de genèse, c’est-à-dire d’explication depuis son origine.
  2. Ce qui précède serait sans intérêt si cela ne nous était pas présenté comme un paradigme de différentes assertions qui, durant des millénaires, ont présenté une image de l’être humain vu à partir des choses et non à partir du regard qui regarde les choses. Car dire « l’homme est l’animal social » ou dire « l’homme est fait à l’image de Dieu » place la société ou Dieu comme ceux qui regardent l’homme, alors que la société et Dieu se conçoivent, se nient ou s’acceptent uniquement à partir du regard humain.
  3. Et ainsi, dans un monde où depuis les temps les plus anciens s’est installé un regard inhumain, se sont installés également des comportements et des institutions qui anéantirent l’humain. De même, dans l’observation de la nature, on s’est interrogé, entre autres, sur la nature de l’homme et l’on a répondu comme l’on répond à propos d’un objet naturel.
  4. Même les courants de pensée qui présentaient l’être humain comme un sujet susceptible de se transformer continuellement, ont élaboré cela à partir d’un regard extérieur, partant de différents points de vue du naturalisme historique.
  5. C’est l’idée sous-jacente de “nature humaine” qui a correspondu au regard extérieur sur l’humain. Mais sachant que l’homme est l’être historique dont le mode d’action sociale transforme sa propre nature, le concept de “nature humaine” apparaît subordonné à l’activité, à l’existence, et soumis aux transformations et aux découvertes que cette existence oriente. C’est ainsi que le corps, comme prothèse de l’intention, s’étend dans ses potentialités en humanisant le monde. Ainsi ce monde ne peut plus être vu comme simple externalité, mais comme “paysage” naturel ou humain, soumis à des transformations humaines, actuelles ou possibles. C’est dans ce faire que l’homme se transforme lui-même.